Politique

20h de Zemmour : accusé, levez-vous !

1 décembre 2021
Temps de lecture : 4 minutes

Eric Zemmour était hier soir l’invité du journal télévisé de Gilles Bouleau, sur TF1. S’attendant à être interrogé sur les grandes lignes de son programme, le candidat à finalement dû se justifier pendant 10 minutes sur moult polémiques…

« C’est pourquoi, j’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle »... Les mots retentissent comme une évidence. Solennel, Éric Zemmour épouse symboliquement l’ombre du général de Gaulle en s’adressant aux Français à travers une longue lettre, tragique, seul, le ton grave capté par un micro familier. La mise en scène ne trompe pas.

Sur le fond, Éric Zemmour dépeint une France au bord du chaos. Illustré par des images du quotidien empruntées à divers organismes, films où documentaires – parfois illégalement, son message interpelle d’abord les Français sur leur quotidien gangrené par une insécurité croissante, avant de s’adresser à une population plus âgée, ravivant le souvenir d’un pays puissant et prospère : « Vous vous souvenez du pays que vos parents vous ont décrit, vous vous souvenez du pays que vous retrouvez dans les films ou dans les livres : le pays de Jeanne d’Arc et de Louis XIV, le pays de Bonaparte et du général de Gaulle, le pays des chevaliers et des gentes dames, le pays de Victor Hugo et de Chateaubriand, (…) le pays de Gabin et de Delon, de Brigitte Bardot et de Belmondo… » La nostalgie de l’ancien monde.

« Vous n’avez pas déménagé et pourtant vous avez la sensation de ne plus être chez vous, vous n’avez pas quitté votre pays, mais c’est comme si votre pays vous avait quittés. »

Éric Zemmour

Sur les plus hautes notes de la 7ème symphonie de Beethoven, à la 7ème minute, Éric Zemmour annonce finalement sa candidature, garantissant qu’il n’est plus temps de réformer la France, mais de la sauver. La lettre s’achève par un appel au sursaut : « Dressez-vous ! Nous, les Français, avons toujours triomphé de tout. Vive la République, et surtout, vive la France ! »

Si le fond paraît inattaquable, la forme, elle, soulève en revanche quelques questionnements et déceptions. Trop « vieillot », « amateur », « surjoué »… Dans son équipe, on se félicite du choix de cette ambiance feutrée en se réfugiant derrière « la mode vintage ». Bousculer les codes, casser les traditions modernes… Tous paraissent séduits par ce clip, reconnaissent-ils, « réalisé à la dernière minute ».

Dans les camps adverses, en revanche, l’émotion n’a pas pris. « Il y a zéro suspense comme il y a zéro programme comme il y a zéro maîtrise de soi comme il y a zéro équipe », juge d’abord le député Sébastien Chenu. « Candidat d’opérette », « homme de provocation », « déconnecté de la réalité »… Les politiciens n’y vont pas de main morte.

Sur Twitter, Olivier Faure écrit même ceci : « Le micro de De Gaulle mais le discours de Pétain. La bibliothèque de Pompidou mais les lettres de Renaud Camus. La musique de Beethoven mais les fausses notes d’un passé fantasmé pour un présent caricaturé. La France ne mérite pas cette sinistre mise en scène. »

Pour son directeur de la communication et de l’événementiel, « ce clip ne plait ni aux journalistes, ni aux communicants, tant mieux ! » Véritable chef d’orchestre de ses déplacements et de sa notoriété, Olivier Ubéda évoque un « message fort et qui passe », ayant déjà passé le cap des 2,1 millions de visionnages à 14h, ce mercredi.

Un JT aux allures de procès

Comme l’exige la tradition, Éric Zemmour se prête ensuite à l’exercice du journal télévisé, sur TF1. Gilles Bouleau l’interroge d’abord sur la mise en scène gaullienne de son annonce, ce à quoi le candidat réoriente la question de l’image à celle de son projet « inspiré de ce qu’a voulu faire le général en s’inspirant du passé, avec des moyens modernes ». Puis, le journaliste embraye sur son statut d’homme d’État, en référence au doigt d’honneur adressé à une militante lors de son déplacement à Marseille. « J’ai souvenir de gestes, de mots de Jacques Chirac, de Nicolas Sarkozy et d’autres : ils étaient chefs d’État, je ne suis pas encore président« , se justifie-t-il, concevant toutefois l’inélégance du geste, mais « qui correspondait à l’exaspération de cette folle journée ».

Gilles Bouleau s’essaye alors à d’autres reproches en l’amenant sur le terrain du féminisme et des petites phrases polémiques issues de ses livres. « Je ne suis plus le journaliste, l’écrivain, le polémiste… Je suis candidat à l’élection présidentielle », lui rappelle-t-il. Avant de conclure : « Il n’y a pas eu de questions sur mon projet politique et je le regrette. »

Éric Zemmour réapparaîtra donc ce dimanche, au Zénith de Paris, où 7000 personnes sont attendues.

    Très belle plume et bon article.

    Pour ma part, la vidéo de candidature d’Eric Zemmour a fait mouche, notamment sa phrase « ce pays dont vos enfants ont la nostalgie sans même l’avoir connu ». Sentiment qui m’habite depuis ma tendre jeunesse. Un vieux avant l’âge probablement…

    ps : une coquille s’est glissée :
    « … empruntées à divers organismes, films oU documentaires »
    ^

    Remarquable papier, Maud.

    Sur le fond il n’y a effectivement rien à redire sur les propos d’Éric Zemmour, tant ceux-ci font écho à la France que nous chérissons. Les références historiques, littéraires et cinématographiques parlent à notre plus intime, quelle que soit la génération à laquelle nous appartenons.

    Quand il dit que son projet est “inspiré de ce qu’a voulu faire le général en s’inspirant du passé, avec des moyens modernes”, vient immédiatement à l’esprit le magnifique aphorisme de Charles Maurras : « L’avenir appartient à qui recueille et sème l’éternelle fleur du passé ». Pareillement, son – mon – maître Jacques Bainville est omniprésent, par l’esprit de sa pensée, dans ce que le désormais candidat Éric Zemmour nous dit d’un ton grave et solennel.

    Sa description d’une France au bord du chaos et menacée d’engloutissement ne peut choquer que ceux qui refusent de regarder la réalité de la situation de notre pays en face et ceux qui continuent de la voir avec des lunettes roses.

    Sur la forme en revanche, le bât blesse un peu sur plusieurs points et la très bonne impression d’ensemble s’en trouve légèrement atténuée.

    L’appel aux mânes du général de Gaulle s’affiche d’emblée dans un cadre patiné par le temps, une atmosphère « vieille France » rassurante – on sent que McFly et Carlito ne risquent pas de débarquer dans la seconde. Seul le micro n’a visiblement pas connu le 18 juin 1940.
    Les effets sont tout de même un soupçon appuyés…

    La 7e Symphonie de Beethoven ? Très bien, car elle ajoute à la solennité et à la gravité du moment.

    Les images empruntées, quant à elles, me paraissent tout à fait inutiles et viennent alourdir la présentation.

    Reste la posture physique d’Éric Zemmour. Sans pour autant singer le Général, il aurait dû tenir en main les feuillets de sa lettre plutôt que de les laisser posés à plat sur le bureau. Cela l’aurait obligé à se tenir droit, l’importance de ces instants s’en trouvant augmentée.

    Remarques certes de détail, mais il eût été assez simple de ne pas prêter le flanc à de telles critiques.

    Et puis après tout, n’est pas Charles de Gaulle qui veut !

    Je rejoins ce que dit Gérard AUZOU, notamment sur l’ajout des clips à la vidéo de Zemmour. C’est peut-être un réflexe à force de consommer du contenu politique et autre, mais quand quelqu’un comme ça rajoute des appuis émotionnels à son discours, je me dis que soit on me prend pour un con qui n’est pas capable de comprendre les mots à eux-seuls et à qui il faut des illustrations « voici quoi ressentir » infantilisantes — ou que le personne qui tient le discours n’a pas assez confiance en ses propres dires… ou les deux.

    Mais bon, ce n’est pas fait juste pour moi, et tant mieux.

    Et oui, il faut absolument qu’il se tienne plus droit, notamment quand il est assis.

    Un complément à mon commentaire initial…

    Sur le fond de la déclaration d’Eric Zemmour, c’est sa péroraison que j’ai le plus vivement appréciée :

    « Vive la République et surtout, vive la France ! ».

    La république n’est en effet jamais qu’une forme de gouvernement parmi d’autres.
    Seule la France compte !

    Ainsi, fais-je mien ce que Charlotte d’Ornellas – à Valeurs Actuelles, ce que Maud est à Livre Noir – avait déclaré à ce sujet :

    « Je me réveille le matin, je suis Française, pas républicaine. Je mange une gastronomie française, pas républicaine. Je parle français, pas républicain… La république n’est qu’un cadre. Ce n’est pas un mode de vie, ni une civilisation. »

    Moi aussi, quand je me réveille le matin, je suis Français pas républicain.

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