Le projet de loi immigration sera débattu à l'Assemblée nationale en automne 2023 : il semble qu’appliquer parfaitement ces OQTF soit quasi-impossible. Que préconisez-vous et quel ratio vous semblerait acceptable et possible ?
<strong>Tout ce qui pourra simplifier l’édiction et la mise en œuvre des mesures d’éloignement du territoire des étrangers en situation irrégulière ou représentant une menace grave pour l’ordre public sera le bienvenu. Le projet de loi porté par le ministre de l’Intérieur comporte une série de simplifications procédurales qui s’inspirent des propositions faites soit par le président de la commission des lois du Sénat, François-Noël Buffet, soit par le Conseil d’État. Il est urgent de les adopter et de les appliquer. Elles ne permettront pas, à elles seules, de reprendre le contrôle des flux migratoires mais elles sont indispensables.
L’objectif d’une exécution à 100 % des OQTF est un propos de tribune, dénué de tout réalisme et qui n’engage pas le ministre. Essayons déjà de faire aussi bien que le Danemark !
Au-delà des dispositions du projet de loi du ministre de l’Intérieur, l’amélioration du taux d’exécution des mesures d’éloignement exige une forte volonté politique dans les rapports avec les pays d’origine des clandestins. Il faut faire comprendre aux autorités de ces pays que leur refus de délivrer les laissez-passer consulaires nécessaires au retour sur leur territoire de ces étrangers entraînera des mesures de représailles de la part de la France. Ces représailles doivent affecter d’abord la délivrance des visas et notamment des visas de long séjour à destination de la France, mais elles doivent aussi porter sur des matières autres que la circulation des personnes : relations commerciales, coopération scientifique, culturelle ou humanitaire. C’est la raison pour laquelle ce sujet doit mobiliser non seulement le ministre de l’Intérieur, mais aussi la Première ministre, voire le président de la République. C’est cette mobilisation qui fait défaut depuis 2012. Le contrôle des flux migratoires est aussi une affaire de négociation bilatérale et, hélas, dans ce type de négociations, il y a toujours de mauvaises raisons pour ne pas placer les questions d’immigration « au sommet de la pile ».
Vous avez déclaré récemment « il y a des pays vis-à-vis desquels on n'essaie même pas de renvoyer les clandestins ». Pourriez-vous préciser lesquels, pour quelle raison, et comment remédier à cette situation ?
Il existe malheureusement dans le monde des pays dans lesquels l’État est inexistant ou en situation de grande faiblesse : on peut penser à la Libye ou à certains États de la Corne de l’Afrique. Il y a aussi des pays avec lesquels nos relations diplomatiques ou consulaires sont interrompues comme certains États du Sahel. Il y a enfin des pays avec lesquels nous sommes en froid. Par la force des choses, l’éloignement des ressortissants de ces pays qui sont en situation irrégulière en France est particulièrement difficile et on ne peut pas reprocher au ministère de l’Intérieur de donner la priorité à des éloignements plus faciles à mettre en œuvre.
Que pensez-vous de la proposition de Gérald Darmanin de légaliser les sans-papiers sur les métiers dits « en tension » ? Est-ce un possible appel d’air ?
Les tensions sur le marché du travail existaient déjà en France il y a quinze ans. Et elles avaient conduit les ministres de l’époque, Brice Hortefeux en charge de l’immigration et Xavier Bertrand en charge du travail, à prévoir par circulaire une procédure de régularisation des étrangers clandestins occupant un de ces métiers en tension. Manuel V
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