Géopolitique

La Chine grande gagnante de la guerre en Ukraine ?

14 mars 2022
Crédits photo : ONU / Flickr Creative Commons
Temps de lecture : 3 minutes

Depuis le début du conflit russo-ukrainien, la Chine joue à un entre-deux diplomatique. Donnant des garanties aux Occidentaux et aux Russes, la guerre en Ukraine pourrait être favorable à l’Empire du Milieu sur le long terme.

La Chine sortira victorieuse du conflit russo-ukrainien. Du moins, c’est le mot d’ordre entendu à Pékin ses derniers jours. Les dirigeants chinois espèrent que la rupture entre le camp occidental et la Russie sera profitable au pays une fois les cendres de l’Ukraine dispersées. Évitant de critiquer le gouvernement russe, la Chine reste un interlocuteur important pour la Russie. Toutefois Xi Jinping a tendu la main aux dirigeants européens la semaine dernière en proposant une médiation chinoise et en annonçant l’envoi d’une aide humanitaire en Ukraine.

La Chine contre deux puissances déclinantes

La Chine doit rester au-dessus de la mêlée. Les États-Unis ont depuis longtemps dénoncé une forme de double jeu. Certains responsables de Washington ont même affirmé que la Russie avait demandé une une aide économique et militaire à la Chine, ce que Pékin dément pour le moment. L’Empire du Milieu a compris qu’elle était face à des puissances en déclin. Le comportement du gouvernement chinois est d’ailleurs détaillé par Zeng Yongnian, professeur à l’Université de Hong-Kong : « Cela signifie que tant que nous ne commettons pas d’erreurs stratégiques terminales, la modernisation de la Chine ne sera pas écourtée, et au contraire, la Chine aura encore plus de capacité et de volonté pour jouer un rôle plus important dans la construction d’un nouvel ordre international ». De plus, le regard des États-Unis est un temps tourné vers l’Ouest ce qui laisse le temps à la Chine de se développer dans le Pacifique.

Un entre-deux qui n’est pas des plus évidents

« À long terme, la Russie va être le paria de la communauté internationale, et la Russie n’aura personne d’autre vers qui se tourner que la Chine » indique le directeur du programme sur la Chine au Stimson Center de Washington, Yun Sun. Mais, trop se rapprocher de la Russie risquerait d’enraciner l’animosité envers la Chine en Europe et au-delà, une possibilité qui inquiète le gouvernement chinois. Et, si l’Allemagne, la France et d’autres alliés renforcent leurs défenses comme promis, les États-Unis pourraient finalement être libérés pour déplacer davantage de leurs ressources militaires vers la lutte contre la Chine. Joe Biden a d’ailleurs promis de rallier une « alliance des démocraties », tandis que les chefs militaires américains disent qu’ils ne laisseront pas l’Ukraine les distraire de la Chine.

La guerre ne se fait jamais dans la vérité. À trop reprendre le discours russe, les Chinois pourraient bien exaspérer le gouvernement américain. « Ce n’est tout simplement pas bon pour la réputation internationale de la Chine » a déclaré à ce sujet Bobo Lo, expert des relations sino-russes à l’Institut français des relations internationales. La Chine pourrait également faire face à des perturbations économiques dues à la guerre et aux efforts occidentaux pour punir la Russie en restreignant le commerce et en coupant ses institutions financières. Les responsables chinois ont dénoncé de telles mesures, et tandis que les États-Unis et leurs alliés ont fait preuve d’unité en les imposant, d’autres pays partagent les réserves de Pékin quant à l’utilisation de puissants outils économiques comme armes. Quoiqu’il en soit, l’économie chinoise est suffisamment grande pour absorber des coups qui en paralyseraient d’autres. Les entreprises chinoises pourraient même finir par profiter du besoin désespéré de commerce de la Russie, comme cela s’est produit lorsque Moscou faisait face à des sanctions suite à l’annexion de la Crimée en 2014.

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