Quel vote pour les catholiques en 2022 ?
21 février 2022
Après « Élections : un vote pour quelle société ? » précédant l’élection présidentielle de 2012 et « Dans un monde qui change, retrouver le sens du politique » publié en 2016, le conseil permanent de la Conférence des évêques de France (CEF) publie « L’espérance ne déçoit pas », des éclairages pour l’année électorale 2022.
Par cette déclaration coutumière, les évêques s’adressent à 32,6 millions de Français, dont encore 4,7 millions se qualifient de « catholiques engagés » (Rapport de l’observatoire de la laïcité, 2019). Ne représentant plus que 10% des électeurs, le vote catholique « engagé » est numériquement faible. Pourtant, ses réseaux ont pu incarner une certaine influence en 2017, notamment auprès de François Fillon soutenu par Sens Commun et La Manif pour tous. A la manière de l’influence des protestants évangéliques sur Donald Trump, les catholiques français ont un rôle à jouer en 2022.
Le vote, un devoir moral pour les catholiques
« L’espérance ne déçoit pas » ne bouleverse pas la vision catholique du jeu démocratique mais, à l’appui de la Doctrine sociale et du Catéchisme de l’Église, se contente de rappeler 7 points fondamentaux que les catholiques peuvent utiliser dans leur discernement. Les évêques prônent un débat démocratique pacifié visant le bien commun. Ils rappellent le respect inconditionnel de toute vie humaine et réaffirment leur opposition à l’euthanasie et à l’allongement du délai d’accès à l’avortement. Les libertés religieuses sont également défendues : elles sont utiles à la société autant que nécessaires aux individus. Enfin, dans la droite orientation du Pape François, les évêques défendent une écologie intégrale et une vision de l’immigration largement positive.
Unanimement les évêques constatent un monde politique imparfait. Le vote est malgré tout considéré comme un « devoir moral » pour tous catholiques (Catéchisme de l’Église catholique, §2240). Il s’agit donc de choisir, parmi les candidats, celui dont le programme semble prendre en compte les enjeux les plus décisifs pour la société française. Si depuis 1972 et la publication de « Politique, Église et foi » l’Église ne se permet plus de donner des consignes de vote à ses ouailles, les différentes prises de paroles des évêques français font apparaitre une désunion politique très claire. Les tenants du cordon sanitaire s’opposent aux « partis extrêmes » depuis les premiers pas du Front National et prient pour les migrants quand les conservateurs, inquiets des nouvelles transgressions sociétales à venir, défendent la ligne du « meilleur possible » (L’espérance ne déçoit pas, §26) et soutiennent la Marche pour la Vie.
L’avortement et l’euthanasie comme lignes rouges
Plusieurs points non-négociables ou qui devraient susciter selon le Cardinal André Vingt-Trois une « impossibilité de conscience » (L’espérance ne déçoit pas, §26) ont d’ores et déjà été mis en avant par l’Église catholique. En 2012, Monseigneur de Germiny insistait sur « le droit des personnes âgées, malades ou dépendantes d’être accompagnées et soignées jusqu’au terme naturel de leur vie » et « le droit des enfants d’être conçus et élevés par un père et une mère ». Le médiatique Abbé Grosjean du diocèse de Versailles préconisait que « le chrétien reste sensible aux questions éthiques qui touchent au fondement même de la société ».
Il n’est pas question de considérer que les questions relatives au système économique, à la nature ou aux migrations seraient de second ordre. L’Église a largement contribué à transmettre ses positions sur ces sujets à travers des encycliques (Laudato Si en 2015 et Fratelli Tutti en 2020). Mais le chrétien est légitimement en droit de s’inquiéter de la (re)définition de l’homme qui met en branle la vision authentique du bien commun sur laquelle la société française s’était construite jusqu’à aujourd’hui. Ce bouleversement touche à la conception de la vie humaine qui fonde la possibilité ou non de faire société. Sans chercher le candidat parfait, les catholiques seront vigilants face à toutes nouvelles transgressions éthiques et pourront réaffirmer que l’anthropologie humaine, tant querellée de nos jours, est le socle d’une société saine.