Russie – Ukraine : une guerre de propagande
4 mars 2022
Pour ce qui est de la propagande de guerre, le conflit russo-ukrainien ne fait pas figure d’exception. Des deux côtés de la ligne de front, les belligérants se lancent dans une guerre de l’information sans merci. Décryptage.
« Quand la guerre est déclarée, la vérité est la première victime » écrivait Lord Arthur Ponsonby en introduction de son livre Le Mensonge en temps de guerre (1928). Dans cet ouvrage, pionnier sur l’étude des mécanismes de la propagande, cet homme politique britannique résolument pacifiste décrit les différents ressorts de la communication de guerre. Près d’un siècle plus tard, force est de constater que la Russie et l’Ukraine livrent une véritable bataille de l’information, de l’image et des chiffres.
La Russie menacée et l'Ukraine agressée
L’une des premières caractéristiques de la propagande de guerre consiste à rappeler que son camp ne veut pas de la guerre et que c’est donc l’adversaire qui est responsable du déclenchement des hostilités. Dans la nuit du 23 au 24 février, l’allocution de Vladimir Poutine qui annonce le début de l’offensive contre l’Ukraine, s’inscrit parfaitement dans cette mécanique. Après avoir rappelé que la Russie a tout fait pour « s’entendre avec les États-Unis et leurs alliés » et « pour que la situation soit réglée de manière pacifique », le président russe invoque l’argument d’une guerre défensive. À l’écouter, Moscou n’aurait d’autre choix que de lancer cette « opération militaire spéciale » contre l’Ukraine. « L’arrogance » et « le mépris » des Occidentaux qui entendraient élargir l’OTAN vers l’Est seraient responsables de cette offensive. « On nous a trompés […] on nous a roulés […] Pour notre pays, c’est une question de vie ou de mort, […] c’est une menace réelle non seulement pour nos intérêts mais pour l’existence même de notre État. » détaille Vladimir Poutine à ses concitoyens. Et d’ajouter : « Je le répète, nos actes sont une auto-défense. » Ce discours qui pose la Russie en situation de victime lui permet d’obtenir l’adhésion des citoyens russes au conflit qu’il entend lancer. De fait, plusieurs articles de la presse internationale relaient l’opinion de la population russe. D’après des propos rapportés par Euronews, les Moscovites reprennent à leur compte la rhétorique présidentielle. Ainsi en Russie, les mots "déclaration de guerre" ou "invasion" sont censurés.
Côté ukrainien, la mécanique est la même. Dès ses premières allocutions, le président ukrainien fait de la Russie l’agresseur – ce qui est factuellement vrai – et dédouane l’Ukraine de toutes responsabilités. Les médias ukrainiens se font les relais de ce discours. Ainsi, la plupart des titres nationaux décrivent les Russes comme les « envahisseurs » ou les « agresseurs ». Outre cette responsabilité qui incomberait uniquement à la Russie, Zelensky impose une vision tout à fait manichéenne du conflit. Il y aurait le camp du Mal avec la Russie et son allié biélorusse. Et le camp du Bien dont il serait la figure de proue. Ainsi, sur les réseaux sociaux où il apparait régulièrement, le président ukrainien se veut le chantre de la paix, le leader de « la coalition anti-guerre », le protecteur de « l’Europe et du monde ». « Vous avez choisi le bon côté de l’histoire » écrit-il à l’attention de ses alliés le 2 mars sur son compte Twitter. En Occident, sa stratégie se révèle tout à fait efficace. Les titres de presse à son égard ne tarissent pas d’éloges. « Héros de la liberté » illustre Le
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