Politique

Zemmour, une révolution philosophique

25 novembre 2021
Crédits photo : Livre Noir
Temps de lecture : 3 minutes

L’attraction qu’exerce Eric Zemmour ne peut s’expliquer seulement par ses propositions radicales et provocatrices, sa verve rhétorique, son incorrection politique. Il y a quelque chose de plus profond : Zemmour inaugure la remise en cause d’un cycle idéologique qui est celui des droits de l’homme, tel qu’il s’est développé depuis les années 1970. Initialement conçus, à la Révolution, comme des droits universels mais non négociables, des droits non pas de la majorité mais de l’humanité, des droits publics en quelque sorte, ils ont fait l’objet d’une captation croissante, une privatisation, par des minorités activistes qui ont nourri de leurs revendications des cours de justice avides de création jurisprudentielle, et auxquelles les « libertés fondamentales » offraient un champ illimité. La conséquence de cette multiplication des droits, comme Jésus multipliait les pains, et de la primauté que les juges leur ont progressivement conférée sur l’intérêt général et les raisons d’Etat (la sacralisation de la vie privée et familiale en offre un bon exemple, qui empêche bien souvent l’expulsion de délinquants étrangers), a conduit à un relativisme radical dans l’ordre du bien public : puisque tout est liberté, rien n’est plus ni bien ni mal, soi ou autre, citoyen ou étranger, car il n’y a plus un Bien commun que la société et l’ordre politique doit poursuivre mais des individus et des communautés, titulaires de droits infinis, que rien ne saurait limiter et surtout pas l’intérêt et la survie de la nation.

C’est un monde sans frontières, où toutes les revendications ont droit de cité, peu importe qu’elles entrent en conflit et qu’elles fracturent les sociétés qui n’y apportent aucune restriction. Eric Zemmour est le premier homme médiatique (et désormais politique) à réfuter cette idéologie, à remettre en cause la prééminence des libertés individuelles sur la liberté collective, et à remettre, au cœur du politique sa fonction de séparation : verticale, entre la loi et les droits, l’espace public et l’espace privé, l’intérêt national et les demandes particulières ; et horizontale, entre le bien et le mal, entre le citoyen et l’étranger, entre l’institution familiale et la sexualité, entre le criminel et la victime, entre l’ami et l’ennemi, entre son pays et le reste du monde, entre la civilisation européenne et la civilisation islamique. Alors que les hommes politique de la vieille école ne cessent d’ânonner qu’« il faut rassembler », lui, au contraire, répète comme le Christ qu’il vient pour séparer (Matthieu 10,34 : « je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive »). Si le discours sur l’immigration d’Eric Zemmour a rencontré un écho nouveau par rapport à celui du RN, c’est parce qu’il n’a pas le même fondement : il est en effet le premier à assumer totalement, non pas seulement que l’immigration créée des problèmes de délinquance et de chômage, en clair « d’ordre public » (auquel cas il n’y a aucune objection philosophique à ce que la France devienne une République islamique), mais que l’Autre n’est pas le Même, autrement dit que l’immigration musulmane massive pose un problème existentiel et civilisationnel, indépendamment de tout question de délinquance, de terrorisme et d’intégration. Zemmour réaffirme ainsi, ce qu’aucun politique n’avait fait depuis De Gaulle, la singularité de l’être Français et la primauté de son droit à persister dans son être. En ce sens, le clivage entre « patriotes » et « mondialistes » est trop étroit, trop superficiel, pour catégoriser le nouveau clivage de la société française et pour saisir en quoi cette campagne inaugure un cycle d’affrontement politique inédit et de très longue haleine. 

Reste à savoir si cette révolution dans le rapport à la chose publique arrive au moment opportun, et si Eric Zemmour est apte à l’incarner dans un costume de candidat aux élections présidentielles. Gageons cependant que cette rupture fera date, quelle que soit le succès de la mue politique du journaliste. Il sera peut-être le sacrifié qui ouvre la voie sans récolter les fruits de sa ruade ! A suivre…

    Permettez moi une critique : ce n’est pas d’un cycle des droits de l’homme ( universels et fondés par la révolution française …) qu’il faudrait parler, mais d’un cycle des droites de l’hommisme, si j’ose écrire, dans le sens qu’il réduit l’être humain à tous les ismes, dès qu’il en évoque une différence …( exemple de Zemmour : racisme, antisémitisme…)

    « La prééminence des libertés individuelles sur la liberté collective »… euh, vraiment?

    La pandémie d’hystérie Covid, avec ses incarcérations et inoculations forcées sont un exemple de prééminence des libertés individuelles sur la liberté collective?

    La bien-pensance, le « wokisme », l' »anti-racisme », l »anti-fascisme » — tous ces mouvements de violence politique, de censure et d’intolérance ne sont-ils pas justement avancés sous l’égide du « bien commun »?

    Ces systèmes de solidarité nationale, sur lesquels les populations immigrés, qui les parasitent, pèsent (mais ce ne serait pas mieux si elles étaient parasitées par des Français) — ces systèmes qui dérobent le fruit de leur travail aux uns sous le cachet de la prospérité collective (des répartiteurs…), ces systèmes ne représentent-ils pas l’inverse de « la prééminence des libertés individuelles sur la liberté collective »?

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