En janvier, je me rends presque par hasard à une réunion du Collectif de sans-papiers du XXᵉ arrondissement (CSP20). Ayant déjà enquêté sur les associations pro-immigration en infiltrant Utopia 56, je connais déjà les méthodes de ce genre d'organisations, mais ce que je découvre dépasse l'entendement : les clandestins qui adhèrent au collectif doivent « pointer » dans des manifestations politiques dans l'espoir d'être aidés à obtenir des papiers.
Infiltration fortuite
MARDI 30 JANVIER 2024 - Nous sommes mardi 30 janvier peu avant 19h et je déambule dans le quartier des Amandiers alors qu'il fait déjà nuit noire, à la recherche de la Fasti (Fédération des associations de soutien à tou-t-es les immigré-e-s). La semaine précédente, j'ai découvert que s'y réunissait « 20ème solidaire avec tou-t-es les migrant-e-s », un collectif d'arrondissement qui fait partie de la Marche des Solidarités, largement mobilisée ces derniers temps contre la loi Darmanin. Le souci est que les horaires publiés sur le site de l'association datent de 2015. Il y a donc de fortes chances qu'ils soient obsolètes et je n'ai aucune idée de ce que je m'apprête à trouver.
J'arrive à heure pile devant les locaux fermés, peinturlurés de vert et d'affiches pro-immigration : il n'y a personne. Déçue, j'entreprends de faire le tour du pâté de maison pour observer le coin. Un immeuble qui appartient au même îlot urbain attire mon attention. De nombreux hommes, d'origine subsaharienne, entrent et sortent. Les chaussures des visiteurs sont alignées dans le hall, comme dans une mosquée. Je ne m'attarde pas.
Lorsque je repasse devant la Fasti, je constate que plusieurs hommes, d'origine subsaharienne également, attendent en conversant dans une langue étrangère. Je décide d'attendre moi aussi, et quelques secondes plus tard, une grande femme brune qui porte des lunettes et une coupe courte apparaît. « Moi c'est Mériem* », se présente-elle à moi avec un sourire accueillant.
J'apprends que je ne suis pas à la fameuse réunion de 20ème Solidaires mais à la réunion du « CSP20 », un collectif de sans-papiers qui lui est affilié.
« Tu as beaucoup de chance d'être venue aujourd'hui, c'est la première fois depuis plusieurs années que nous nous réunissons ici », m'explique Mériem alors que nous attendons la personne qui a les clefs pour ouvrir le local en compagnie d'une quinzaine de sans-papiers. Habituellement, le collectif se réunit au « foyer Bisson », une résidence sociale qui appartient à l'association Coallia et qui loge de nombreux travailleurs migrants. « On a eu des soucis avec le nouveau gestionnaire, il ne nous accepte plus » expose-t-elle amèrement. Mériem m'apprend que la Fasti a accepté de prêter ses locaux au CSP20 depuis.
Arrive enfin Vanina, une femme d'une cinquantaine d'années qui porte une queue de cheval, c'est elle qui a les clefs. Nous entrons dans la salle principale de la Fasti et la porte-fenêtre reste ouverte, pour accueillir les retardataires. Nous regroupons les tables et les chaises pour être tous assis les uns face aux autres. Les affiches appelant à abolir le Céseda (Code de l'entrée et du séjour des étrangers et des demandeurs d'asile) parsèment les murs, il y a une cuisine et un bar dans le coin de la pièce.
C'est Vanina qui anime la réunion, tandis que Mériem me fournit des détails sur le fonctionnement du collectif. Les interventions en français sont traduites en peul et en soninké par deux sans-papiers pour ceux qui ne maîtrisent pas notre langue. Vanina rappelle les résolutions prises pour l'année 2024 : « On va alterner entre actions, réunions de formation politique et permanences juridiques cette année », commence-t-elle. Les « actions » consistent en des tractages et du porte-à-porte dans les foyers de travailleurs migrants pour recruter les nouveaux membr
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